La première mesure d’un grand parti démocratique
Le front national a donc remporté une quinzaine de villes aux précédentes élections municipales. C’est à la foi peu et beaucoup. Peu par rapport à l’ensemble des villes existantes en France, peu par rapport au score de sa candidate nationale à la dernière présidentielle, mais beaucoup par rapport à son implantation locale précédente, et beaucoup trop par rapport aux dégats que ces communes vont subir.
Mais somme toute, c’est quinze municipalité vont nous permettre de voir ce que vaut ce parti à l’œuvre. Rappelons simplement que sur les quatre mairies FN constituées en 1995, 3 ont connu des affaires de corruptions ce qui en proportion est énorme.
Et je ne parle même pas des mairies condamnés pour non respects du principe de non-discrimination : le Front National s’est toujours vanté de vouloir établir la préférence nationale, c’est à dire d’abolir l’Article 1 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.
Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.
Il n’est jamais précisé que les distinctions sociales peuvent être battis sur la nationalité.
Le préambule de la constitution de 1946 instaure également en son article 5 que :
Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi. Nul ne peut être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances.
La préférence nationale est donc une atteinte à ce préambule. Ce qui prouve bien la proximité idéologique du Front National avec les « les régimes qui ont tenté d’asservir et de dégrader la personne humaine » (début du préambule).
Mais passons sur ces points, et venons en à la pratique effective du FN au pouvoir.
Lors du premier conseil municipal à Hénin-Beaumont avec une majorité Front National, des policiers étaient là pour empêcher les citoyens d’Hénin-Beaumont d’accéder au conseil. S’il n’est pas certains que le maire ait été à l’origine de ce filtrage, il n’a visiblement rien fait pour l’empêcher. En revanche des membres du FN mais pas de la commune ont visiblement pu assister à ce conseil municipal. La démocratie version FN c’est donc : nos amis peuvent voir nos décisions, nos citoyens non.
Un sympathisant FN, voire militant, a défendu cette décision par le message suivant :
@maieulr @ayyacho Il ne faut pas confondre démocratie et tohu-bohu.
— johnpalissy (@johnpalissy) 5 Avril 2014
Il apparaît donc que l’accès de citoyens aux séances d’un conseil municipal est un tohu-bahu, un désordre. Autrement l’accès au droit fondamental dans une démocratie représentative de savoir ce que vote nos élus est un désordre. Peut-être le Front National préfère un ordre nouveau ?
Si des mesures d’ordres publiques peuvent justifier éventuellement une restriction de l’accès des citoyens au débat des assemblées, ces mesures ne peuvent être qu’exceptionnelles et justifié par un contexte précis (risque d’émeutes). Il semble donc que le FN considère les citoyens de sa ville comme des émeutiers potentielles, alors même qu’aucun appel en ce sens n’a été émis. à€ moins que constituer un comité de vigilance face à l’action des élus soit forcément un motif de trouble ? Dans tous les cas, cela en dit long sur la conception de la démocratie de ce grand parti.
Une autre raison visant à restreindre l’accès aux délibérations est d’ordre logistique : manque de place. C’est ainsi que le réglement de l’Assemblée-Nationale limite l’accès aux tribunes, mais selon des critères clairs : soit une invitation écrite d’un député, soit être parmi les dix premiers présents. Remarquons que dans tous les cas, il est nécessaire que le mode de sélection « par cartons » ne soit pas le seul mode [1]. Mais peut-être le FN a-t-il peur de s’inspirer du règlement « la geuse » que ses ancêtres ont combattu.
Pendant ce temps, à Grenoble, une nouvelle majorité EELV-PG-Citoyens non seulement laisse l’accès au conseil municipal d’installation publique (certes via une retransmission vidéo en directe mais tout de même), mais propose aussi de l’étendre au déla des seuls présents par la retransmission vidéo sur internet et va même jusqu’à suspendre la séance du conseil municipal pour que celui-ci puisse écouter la demande de certains de ses habitants.
Preuve en est que si d’aucun veulent renvoyer dos-à -dos l’extrême droite et « l’extrême gauche » il y a une différence majeure : le respect de la condition de la démocratie représentative, à savoir l’accès donné au citoyen aux débats et votes des élus.