La civilisation adultère

Dois-je écrire sur les dernières phrases de Guéant »‰ ?

On a entendu les propos de ce « ministre » — je mets des guillemets, car un ministre est normalement au service des personnes — sur l’inégalité des civilisations comparées à certains propos du XIXe siècle sur l’inégalité des races.

Évidemment que les formes de racismes d’État qui se développent aujourd’hui, font penser au passé.

Pour autant, il me semble que les défenseurs des droits de l’homme sont tombés en plein dans le piège. On a atteint le point Godwin.

Le fait que ce point ait été atteint ne prouve pas forcément une erreur d’analyse politique, mais clairement une erreur de stratégie, Guéant n’attendait que cela pour se poser en victime, et pour attaquer la gauche.

Partant du concept globalisant de civilisation, Guéant a été très habile :

  • La civilisation, ce n’est pas l’individu, ce n’est pas la « race », c’est quelque chose qui évolue, ce n’est pas intrinsèque. En ce sens, Guéant évite — en apparence du moins — les dérives de son double Sarkozy sur le déterminisme génétique des criminels.
  • En même temps, la civilisation étant un concept un peu fourre-tout on peut prendre ce qu’on veut. Par exemple, voir la « civilisation arabe » comme étant discriminante envers les femmes, en oubliant que c’est cette civilisation arabe qui a fourni [1] les notions de numérotation par position, le zéro, l’algèbre, des tas d’outils sans lesquels je ne pourrais pas écrire ces lignes, les propos de Guéant n’auraient pu être diffusés à une telle vitesse etc.

La gauche était dans un double piège :

  • soit elle se taisait et la droite aurait beau jeu de dire « vous cautionnez nos propos ».
  • soit elle ne se tait pas, et la droite hurle aux comparaisons douteuses.

Tout ceci me fait penser à un récit qui nous est narré dans un texte « à la base de la civilisation occidentale ». La situation est inverse : un groupe — présenté par le narrateur comme pharisien — cherche à piéger un homme, Jésus :

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3
Les scribes et les Pharisiens amenèrent alors une femme qu’on avait surprise en adultère et ils la placèrent au milieu du
groupe.
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« Maître, lui dirent-ils, cette femme a été prise en flagrant délit d’adultère.
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Dans la Loi, Moïse nous a prescrit de lapider ces femmes-là . Et toi, qu’en dis-tu ? »
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Ils parlaient ainsi dans l’intention de lui tendre un piège, pour avoir de quoi l’accuser. Mais Jésus, se baissant, se mit
à tracer du doigt des traits sur le sol.
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Comme ils continuaient à lui poser des questions, Jésus se redressa et leur dit : « Que celui d’entre vous qui n’a jamais
péché lui jette la première pierre. »
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Et s’inclinant à nouveau, il se remit à tracer des traits sur le sol.
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Après avoir entendu ces paroles, ils se retirèrent l’un après l’autre, à commencer par les plus âgés, et Jésus resta seul.
Comme la femme était toujours là , au milieu du cercle,
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Jésus se redressa et lui dit : « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? »
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Elle répondit : « Personne, Seigneur », et Jésus lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas : va, et désormais ne pèche
plus. »

Jn 8, 3-11 (Traduction œ’cuménique de la Bible)

Que la civilisation qui n’a jamais péché jette la première pierre aux autres civilisations »¦

Et la civilisation occidentale se retira, se rappelant ses guerres mondiales, sa destruction des ressources naturelles, ses massacres en tout genre »¦

Notes

[1à€ partir il est vrai d’une œuvre civilisation, mais ce type de subtilité ne fait pas parti de l’esprit qui règne à l’heure actuelle dans les sphères gouvernementales.